dimanche 31 mai 2020

Casseroles de la faim



Drôles de casseroles
A percussion vespérale
Qui n’ont à servir
Que bouillons de colère

Elles tintent tintamarrent
Disent qu’y en a marre
D’être pris pour des pigeons
Trop durs à la casserole
Tiens les poêles s’en mêlent
Variant sur le mot souffrir
Les façons de sucer
Les sandales de cuir

La vieille amie la faim
S'installe en cuisine
Choisit plutôt les pauvres
Là où ça prend son temps
Elle creuse les ventres
Ou les ballonne
Remplace les victuailles
  Par des souvenirs cruels
Le cru et le cuit
Les fumées de fumets
Les épices semées
Les senteurs du passé
Qui passent sous le nez
Cuisines délaissées
Où restent
Bosselées déformées
Pendues inutiles
Les casseroles de la faim




18 mai 2020, un quartier pauvre de Santiago du Chili, El Bosque,
manifeste sa colère en frappant sur des casserole

samedi 30 mai 2020

poème pour la mort de George FLOYD





Je souffle
Une poussière d'étoiles hors la bouche
Ma vie se vide dans un big bang
Un genou sur le cou
Je souffle la poussière d’une photo
Moi ma mère mon père fiers
Qui soufflaient
Pour échapper au Klan
À la corde à l’ostracisme

Je souffle
De plus en plus court
Une sueur près de mon cou
Je souffle de plus en plus rien
Est-ce le tunnel de la mort 
Est-ce mieux que son couloir 
Je souffle une bougie 
Je m'éteins


25 mai 2020, Minneapolis, Georges FLOYD décède
après qu'un policier a appuyé son genou sur son cou 8 minutes et 46 secondes

vendredi 15 mai 2020

Je veux mon asperge










Je veux mon asperge

Blanche craquante juteuse

Quand elle est la meilleure

Au mitan du printemps

Je la veux nettoyée de débris

En barquette de bois ou paillis

Alignée calibrée à sucer

En sauce que je choisirai

Qu’à vélo j'irai chercher

Circuit court au panier

Sans salir l’atmosphère

Comme ces avions

Qui d’oxyde de carbone

Aspergent l'espace






10 avril 2020 , pont aérien pour amener des cueilleurs Roumains
dans les exploitations agricoles allemandes 

 

mercredi 13 mai 2020

Confinement 10/déconfinement 3 Rêve (ou cauchemar)




J’éternue loin du coude à plein volume
J’effleure les mains de la boulangère
Le CO2 gomine mes cheveux
Au sol des crachats brillent
Les nez reviennent en force camus aquilins retroussés
Les cafés ploient sous la commande
Au cinéma un genou, celui de Claire probablement
Des écoles des cris des enfants
Des femmes qui partent porter plainte
Vingt heures zéro applaudissement
Les filles plus en télé-travail leurs jambes
Ça ne pouvait pas durer soupirent les animaux
Quand était le bon temps


11 mai 2020
jour 1 du déconfinement


samedi 9 mai 2020

Yémen coupé en deux





Le Yémen se coupe en deux
Comme un fruit sec 
Un bout de pomme
Trop longtemps seule sur sa branche
Un pneu usé par le désert
Perdu dans les vapeurs
De poudre d’islam de guerre

Le Yémen meurt de trop d’amis
Mal embouchés mal emmanchés
De drôles d’oiseaux à cape blanche
Le ventre rebondi de bombes
Qui aiment à jouer aux gamins
Dans les jardins de leurs voisins

Le Yémen ne sait plus faire le thé
Prendre le temps les soirs d'été
De recoudre ses cicatrices
Dissoudre des clans les caprices
Ce pays là n'aura plus cours
Effondré de trop d'Arabie
Russie Emirats désunis
Il pourrira sans savoir si
Ses deux rejets refleuriront

Proclamation d’autonomie des séparatistes du Sud du Yémen

26 avril 2020



AFP Saleh Al Obeidi

vendredi 8 mai 2020

Confinement 9/déconfinement 2



Comme le lait au feu
L’ombre réduit
Les murs s’entrouvrent
Les bacs à fruits affleurent
aux doigts de pied et aux balcons
Dans la rue on passe
un œil un masque
prudemment
On se méfie du gouvernement
de ses jeux de pêche à la ligne
de ses oui de ses non à la science

Habitués aux oiseaux maintenant
on reconnaît le rouge-gorge la mésange la linotte –
on veut voler à nouveau de ses propres voiles
tourner la clé sans attester quoi que ce soit
applaudir à l'heure choisie ses blues à soi
se transporter à tous les confins de la terre
se déconstruire à bras de loup pas de mouton
vivre les fables désormais et les choisir
se dire que la fille du balcon d’en face
n’est pas un ectoplasme et sait répondre aux mails
être un idiot et sérieux ne pas tout mélanger

danser encore un peu
comme des funambules




5 mai 2020
dernière semaine avant le déconfinement